157/252
Date : 12-10-2024 02:20:59
12 octobre 1999 : Six milliards d'hommes sur la Terre
La population mondiale s'élevait à 1 milliard d'hommes en 1800, 1,6 milliards d'hommes en 1900 et 6 milliards en 2000. Elle aurait atteint les huit milliards à la mi-novembre 2022 selon la Division de la Population des Nations Unies. Elle pourrait encore augmenter d'un tiers pour atteindre 9,7 milliards en 2050 et culminer à 10,4 milliards en 2080 d'après les projections moyennes de l'ONU (note).
Cette croissance très rapide résulte de la baisse de la mortalité et en particulier de la mortalité infantile (enfants de moins d'un an) et de la mortalité maternelle. Elle est la conséquence d'une amélioration sans précédent des conditions de vie moyennes de l'humanité : disparition des grandes famines et augmentation de l'espérance de vie d'environ vingt ans... Elle n'a rien à voir avec la natalité. Depuis les temps les plus anciens, en effet, les femmes n'ont cessé de s'éloigner de leur fécondité « naturelle » (vingt maternités environ dans une vie féconde complète) et, sauf rares exceptions, si, dans un pays, la population augmente, c'est seulement parce que la mortalité diminue plus vite que la natalité.
La croissance démographique des deux derniers siècles est donc étroitement liée à l'amélioration de nos conditions de vie. Elle est désormais derrière nous et l'on peut craindre que la décroissance démographique qui se profile, si elle devient trop rapide, soit le signe d'une dégradation de nos conditions de vie !...
La mortalité infantile, étant arrivée à son étiage, ne peut plus guère diminuer. Il n'y a pas de progrès significatif à en attendre. Par ailleurs, l'indice de fécondité est en train de chuter dans de nombreux pays très en-dessous du seuil indispensable au simple renouvellement de la population. Hors Afrique noire, cet indice de fécondité n'est plus que de 1,91 enfants par femme en 2021 selon le calcul ci-dessous d'Herodote.net, quand il en faudrait 2,1 pour simplement éviter une diminution de la population. Ce non-renouvellement massif des générations est un phénomène complètement inédit dans l'Histoire de l'humanité, du moins en temps de paix !
Dans toutes les hypothèses, la population mondiale hors Afrique noire diminuera bien avant 2100 et le reliquat de croissance sera tout entier porté par l'Afrique subsaharienne dont la population passera de 2 à près de 4 milliards.
>>> Le monde à l'horizon 2050 :
En nous fondant sur les indicateurs des Nations Unies pour 2021 (source), nous avons pu établir le tableau ci-dessous. Il révèle que la population mondiale est d'ores et déjà en voie de diminution - hors Afrique noire -, avec un indice de fécondité global de 1,91 enfants par femme (avec les indicateurs de 2017, nous en étions encore à un indice de fécondité de 2,1). Ce nouvel indice de fécondité est clairement inférieur à ce qui est nécessaire pour simplement renouveler la population, soit 2,1 enfants par femme (davantage dans les pays pauvres).
Hors Afrique noire, la croissance résiduelle est due au reliquat du passé : dans les pays occidentaux et en Extrême-Orient, la population est déjà en train de diminuer ou ne croît plus que par « inertie démographique », du fait de l'arrivée à l'âge de la maternité des femmes relativement nombreuses nées dans les années 1980 ou 1990 ; dans les pays amérindiens, dans le sous-continent indien et dans les pays orientaux, la fécondité est encore légèrement supérieure au seuil de renouvellement de la population mais tend à diminuer.
Soulignons-le avec force ! La croissance de la population mondiale est pour l'essentiel due à l'explosion démographique persistante de l'Afrique noire, qui contraste avec l'affaissement du reste de la planète. Entre 2020 et 2050, l'Afrique subsaharienne générera près de 50% de la croissance démographique mondiale, sa population progressant de 120% et le reste du monde de 20% seulement (6 fois moins rapidement).
>>> Un monde sens dessus dessous :
Le graphique ci-dessous, publié par les Nations Unies en 2019, montre les dix pays les plus peuplés du monde en 2019 avec des projections en 2050 et 2100. Les démographes de l'ONU confirment la croissance soutenue des États-Unis, sous l'effet de l'immigration, mais ils anticipent une diminution d'un tiers environ de la population chinoise d'ici la fin du siècle. Sauf cataclysme majeur, on voit que le Nigeria (900 000 km2 et 733 millions d'âmes) talonnerait en 2100 l'immense Chine (9 500 000 km2) qui n'aurait plus que 1,065 milliards d'âmes (10% de la population mondiale) ! L'Empire du Milieu, qui représentait 35% de la population mondiale en 1850 avec 435 millions d'habitants (un humain sur trois), n'en pèse déjà plus que 18%. L'Europe et la Russie pourraient de leur côté disparaître des écrans radars en dépit d'une importante immigration africaine.
D'une manière générale, les démographes onusiens tablent sur un alignement de la fécondité de tous les pays du monde entre 1,5 et 2 enfants par femme en 2100 avec une moyenne à 1,84. L'Afrique subsaharienne chuterait ainsi de 4,31 à 1,99 enfants par femme, ce que l'on peut admettre et espérer car, même si elle est encore sous-peuplée, l'Afrique a malgré tout des ressources limitées. Cela dit, de publication en publication, les démographes sont toujours aussi déroutés par la lenteur de la transition démographique en Afrique et n'en finissent pas de corriger à la hausse les perspectives d'évolution de la population subsaharienne.
Plus surprenant, l'Extrême-Orient et l'Europe verraient leur fécondité se redresser respectivement de 1,17 à 1,50 et de 1,48 à 1,67. Ainsi, les démographes anticipent un redressement sensible de la fécondité chinoise, de 1,16 enfants par femme en 2021 à 1,48 en 2100 ! Ces projections sont grandement sujettes à caution en particulier lorsque la fécondité est tombée en-dessous de 1,5 ou 1,2 enfant par femme car, à cet étiage, les personnes âgées pèsent d'un tel poids sur les actifs et les jeunes ménages que ceux-ci n'ont plus les ressources d'élever correctement ne serait-ce qu'un ou deux enfants.
De l'avis du démographe Hervé Le Bras (Books, novembre 2022), ces projections très optimistes de l'ONU traduiraient la volonté politique de dessiner un avenir serein dans lequel s'effaceraient les déséquilibres actuels avec de puissants courants migratoires depuis l'Asie du sud et surtout l'Afrique vers l'Europe vieillissante et encore riche, en voie de dépeuplement accéléré.
>>> Un monde plus contrasté que jamais :
En 2022, nous sommes donc 8 milliards d'êtres humains, avec une espérance de vie moyenne de 71 ans (en diminution de près de deux ans en raison du Covid-19). Derrière ce total et ces moyennes se cachent des disparités toujours plus fortes. Jamais dans l'Histoire de l'humanité n'ont en effet été observés d'aussi grands écarts entre les revenus, les espérances de vie et surtout les indices de fécondité, de 6,82 enfants par femme au Niger à 0,88 en Corée.
L'espérance de vie à la naissance et la mortalité infantile (proportion d'enfants morts avant l'âge d'un an) sont les indicateurs les plus pertinents du bien-être collectif car ils reflètent la qualité de l'alimentation et de l'hygiène, des infrastructures publiques et de l'éducation des femmes...
Alors que l’espérance de vie plafonne à 60 ans en Afrique subsaharienne (50 ans environ pour les hommes du Congo-RDC), elle atteint 87 ans pour les Japonaises, soit presque deux fois plus que celle des Congolais ! Notons que le Japon, dont les médias retiennent exclusivement le haut niveau d'endettement public, affiche également un autre record : une très faible mortalité infantile, avec seulement 2 décès pour 1 000 naissances vivantes.
Aux États-Unis, le taux de mortalité infantile s'élève à 6 pour 1 000 naissances vivantes, contre... 4 à Cuba ! Si l'on en croit les données ci-dessus des Nations Unies, les pauvres Cubains ont aussi une espérance de vie égale à celle des Étatsuniens, toutes classes confondues : 76-77 ans pour les hommes, 80-81 ans pour les femmes.
Malgré un système social et économique dont les médias et les dirigeants disent pis que pendre, la France se tient quant à elle à un niveau très honorable, bien meilleur que les États-Unis, tant pour la mortalité infantile (4 pour 1 000 naissances vivantes) que pour l'espérance de vie (79 ans pour les hommes, 85 ans pour les femmes).
|