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Date : 17-11-2024 16:14:50
17 novembre 1917 : Clemenceau forme un gouvernement de choc
Le 17 novembre 1917, Georges Clemenceau (76 ans) forme un gouvernement de choc afin de poursuivre et intensifier la guerre avec l'Allemagne. Il est appelé à la présidence du Conseil par son vieil ennemi, le président de la République Raymond Poincaré.
>>> La France saisie par le doute
Obnubilé par la volonté de poursuivre la guerre jusqu'à la victoire, Clemenceau, président de la commission de l'armée, au Sénat, a auparavant torpillé une offre de paix séparée de l'empereur d'Autriche-Hongrie, Charles 1er, communiquée aux Alliés par le prince Sixte de Bourbon-Parme.
Il prend la tête du gouvernement français à un moment crucial. Les Allemands gardent l'avantage militaire. Ils occupent le nord et l'est du territoire et, depuis la révolution bolchevique du 6 novembre et le retrait unilatéral de la Russie de la guerre, ils peuvent concentrer tous leurs efforts sur le front occidental. Ils le font avec d'autant plus de détermination que les Américains, entrés en guerre en avril aux côtés des Alliés, amènent par centaines de milliers des combattants frais et dispos sur le Vieux Continent. Il est urgent pour les Allemands d'obtenir la victoire avant que ces combattants, encore en cours d'instruction, entrent dans la bataille !
La France est saisie par le doute et la lassitude. Les partisans d'une paix de compromis, comme Joseph Caillaux, relèvent la tête. Sur le front, des soldats excédés par l'incompétence de leurs chefs en arrivent à se mutiner.
Poursuivre la guerre à tout prix
Dans son discours d'investiture devant la Chambre des députés, le 20 novembre, le nouveau président du Conseil, par ailleurs ministre de la guerre, annonce sans ambages son intention de traquer les présumés défaitistes et traîtres qui entravent à l'arrière les efforts des combattants.
Son discours fait appel aux tripes des auditeurs : « Nous prenons devant vous, devant le pays qui demande justice, l'engagement que justice sera faite, selon la rigueur des lois... Plus de campagnes pacifistes, plus de menées allemandes. Ni trahison, ni demi-trahison. La guerre. Rien que la guerre. Nos armées ne seront pas prises entre deux feux. La justice passe. Le pays connaîtra qu'il est défendu... »
Clemenceau veut prouver aux soldats qui se battent dans les tranchées que l'on se préoccupe d'eux et que l'arrière assume sa part de leurs souffrances. Pour les besoins de sa démonstration, il va très vite chercher à faire des exemples sans s'embarrasser de juridisme.
Il défère devant le Sénat, transformé en Haute Cour, l'ancien ministre de l'Intérieur Louis Malvy, qu'il a contraint à la démission le 31 août 1917 en lui reprochant sa complaisance à l'égard des pacifistes.
Le 14 janvier 1918, alors que l'opinion gronde, lasse des privations et de la guerre, il fait brutalement arrêter dans sa salle de bains son ancien ministre des Finances Joseph Caillaux, dans la crainte qu'il ne soit appelé à le remplacer à la tête du gouvernement pour signer une paix de compromis ! Ces deux personnalités, inculpées sur de ridicules accusations de complot (affaire Bolo Pacha), échapperont de justesse à une exécution dans les fossés de Vincennes. D'autres, moins connus et moins entourés, n'auront pas leur chance.
Le 8 mars 1918, devant la Chambre des députés, Clemenceau peut afficher une détermination intacte : « Ma politique étrangère et ma politique intérieure, c'est tout un. Politique intérieure, je fais la guerre; politique extérieure, je fais toujours la guerre ».
Sa détermination vaut au président du Conseil d'être surnommé le « Tigre » ou le « Père de la Victoire ». Les poilus témoignent d'une grande affection pour le vieillard qui n'hésite pas à ramper jusqu'à eux dans les tranchées et l'appellent plus simplement « Le Vieux ».
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