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Date : 10-01-2025 02:06:44
10 janvier 1776 : Thomas Paine publie Common Sense :
On ne peut évoquer la rupture entre l’Angleterre et ses colonies américaines sans mentionner le nom de Thomas Paine. D’origine anglaise mais installé en Amérique à l’âge de 37 ans, ce penseur aux idées radicales joua un rôle primordial dans la prise de conscience populaire qui aboutit, le 4 juillet 1776, à la Déclaration d’indépendance des États-Unis.
Pour cause, six mois plus tôt, le 10 janvier, il publiait un pamphlet intitulé Common Sense, que l’on peut traduire par « Sens commun » ou encore « Bon sens », où il appelait ses concitoyens des Treize Colonies anglaises d'Amérique du nord à s'unir dans une grande nation libérée des servitudes et de la monarchie. Lui-même en suggérait le nom : États-Unis d'Amérique. Ce fut un véritable triomphe qui provoqua dans les colonies d’Amérique comme en Europe, autant d’oppositions que d’enthousiasmes et de débats passionnés.
En tant que « citoyen du monde » et républicain convaincu, Thomas Paine participa activement à deux révolutions d’un côté et de l’autre de l’Atlantique, l’une américaine et l’autre française.
Sens commun (Common Sense), texte adressé aux Américains (1776)
La guerre d’indépendance des États-Unis
Thomas Paine est né en Angleterre le 9 février 1737 dans une famille modeste dont le père était quaker et la mère anglicane.
Clément Pierre Marillier, Quakers embrassant des Indiens en Pennsylvanie, Histoire des deux Indes, 1775, Paris, BnF, Gallica. En 1774 il émigre en Amérique et s’installe à Philadelphie dans l’État de Pennsylvanie, pourvu d’une lettre de recommandation de Benjamin Franklin qu’il avait rencontré à Londres. Il travaille en tant que journaliste et devient éditeur au Pennsylvania Magazine.
Sa pensée est très influencée par la tradition libérale classique et la philosophie des Lumières, ce qui le pousse à apporter son soutien au mouvement indépendantiste américain alors en pleine gestation. En effet Thomas Paine était arrivé en Amérique à un moment crucial de son histoire.
À cette époque, ce qui allait devenir plus tard les États-Unis d’Amérique, n’était encore qu’un petit groupe de treize colonies confinées dans le nord-est américain, propriétés de l’Empire britannique.
Les Bostoniens payant le collecteur d'accises, ou l'application du goudron et des plumes. À l?arrière-plan, un arbre de la liberté, une corde et le Stamp Act affiché. Agrandissement : Henry Sandham, Arrivée des Loyalistes de l'Empire-Uni au Nouveau-Brunswick vers 1783, Ottawa, Library and Archives Canada.Or, de nombreux contentieux économique et social opposaient les colons et la Grande-Bretagne, notamment à propos de nouvelles taxes imposées par le Parlement (dont le Stamp Act de 1765) et du monopole exercé par les navires anglais sur le transport de certaines marchandises comme le thé. Les colons avaient également interdiction d’étendre leurs territoires vers l’ouest pour ne pas entrer de nouveau en conflit avec les Amérindiens.
De cette frustration naît un désir d’émancipation chez une partie des colons qui finalement décident de prendre les armes contre la Couronne. Entre 1775 et 1783, Patriots et loyalistes vont s’affronter dans une guerre où interviennent aussi bien les Français, les Espagnols, les Allemands ou les Canadiens que les nations amérindiennes et même certains esclaves noirs affranchis.
Dès le début de cette révolution, le journaliste Thomas Paine devenu militant radical, prenait parti pour les insurgés américains en publiant son Common Sense.
Réception des Loyalistes américains par la Grande-Bretagne en 1783, gravure de H. Moses d?après Benjamin West.
>>> La publication du Common Sense
Le pamphlet de 47 pages est publié le 10 janvier 1776 à Philadelphie, de manière anonyme. Il se vend à près de 150 000 exemplaires en l’espace de quelques mois (alors que la population des colonies est estimée à 2,5 millions d’habitants), ce qui en fait le livre le mieux vendu de l’histoire des États-Unis et le plus grand succès de librairie qu’ait connu le XVIIIème siècle.
couverture de Common Sense, 1776. Agrandissement : Laurent Dabos, Thomas Paine, vers 1791, Londres, National Portrait Gallery.Ce succès est notamment dû au style simple et largement compréhensible dans lequel le texte est rédigé. L’objectif premier de l’auteur était de convaincre les habitants des colonies de ne pas rester indifférent face à la révolution en cours.
Thomas Paine s'est appliqué à résumer en quatre chapitres tous les arguments que les Patriots proclamaient depuis des années. D’abord, il écrit sur les systèmes de gouvernement en général, et critique la fondation et la structure même du gouvernement britannique. Il en profite pour dénoncer l’incompétence et la corruption chez les monarques anglais et rappelle notamment qu’il y eut huit guerres civiles et dix-neuf rebellions sous la monarchie anglaise.
Ensuite, il émet une critique de la monarchie en général et du système de succession héréditaire qu’il dépeint comme intrinsèquement pervers, illégitime, absurde et contraire à la volonté de Dieu. « Un seul honnête homme est plus précieux à la société et au regard de Dieu que tous les bandits couronnés qui ont jamais existé », écrit-il en guise de profession de foi républicaine.
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