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Date : 06-11-2024 20:00:36
CARNET NOIR - Madeleine Riffaud, héroïne de la Résistance, est morte à l’âge de 100 ans
Protégée d’Éluard ayant connu Picasso et Aragon, la résistante Madeleine Riffaud, décédée à l’âge de 100 ans, était une poète, journaliste et correspondante de guerre pour « L’Humanité » et a consacré sa vie à dénoncer les injustices, estimant devoir payer une « dette de la survie ». Pendant cinquante ans toutefois, elle était restée mutique sur ses années de résistance où elle avait échappé plusieurs fois à la mort, contrairement à nombre de ses camarades.
C’est le résistant Raymond Aubrac qui la secoue dans les années 1990 : « Est-ce que tu vas continuer à fermer ta gueule ? Tes petits camarades qui ont été fusillés à 17 ans, ça t’est égal que personne n’en parle ? », avait-elle raconté à l’AFP.
Elle fait alors le tour des écoles, répond aux interviews. À 100 ans, elle signe « Les Nouilles à la tomate », troisième tome de ses mémoires de guerre en BD paru en août. « Résister, c’est aimer les gens, ne pas haïr. […] Si nous, on a tenu, c’est parce qu’au lieu de nous dire, je suis une victime, on s’est toujours dit je suis un résistant, je suis un combattant ! » Née le 23 août 1924 à Arvillers dans la Somme, cette fille unique d’instituteurs rejoint la résistance à 16 ans.
Élève sage-femme à Paris, elle devient agent de liaison avec ses compagnons communistes des Francs-tireurs et partisans (FTP) de la faculté de médecine.Élève sage-femme à Paris, elle devient agent de liaison avec ses compagnons communistes des Francs-tireurs et partisans (FTP) de la faculté de médecine. Elle devient « Rainer » – en hommage au poète allemand Rainer Maria Rilke – pour signifier qu’elle « n’est pas en guerre contre le peuple allemand mais contre les nazis ».
Le massacre d’Oradour-sur-Glane, un village de sa jeunesse décimé en juin 1944, provoque son passage aux armes. Le 23 juillet, elle assassine de deux balles dans la tête un gradé nazi sur le pont de Solférino. « J’avais pris les armes de la douleur comme aurait dit Paul Éluard. J’avais très mal à l’intérieur de moi, je lui ai tiré dessus presque à bout portant, il est tombé comme un sac de blé. »
La résistante se fait presque immédiatement arrêter. Torturée par la Gestapo, elle est condamnée à mort puis déportée. Avec une amie espionne, elle saute du train vers Ravensbrück mais se fait intercepter. Grâce au consul de Suède, elle est libérée le 19 août grâce à un échange de prisonniers, en pleine Libération de Paris.
Rainer reprend le combat : le 23 août, elle contribue à l’arrestation de 80 soldats allemands dans l’attaque d’un train aux Buttes-Chaumont. Elle recevra la Croix de guerre avec palme.
Après la Libération, elle veut intégrer l’armée mais n’a pas 21 ans. Son engagement s’arrête là. Sans nouvelle de ses amis déportés, hantée par le souvenir des geôles, elle plonge dans la dépression comme elle le raconte dans « On l’appelait Rainer ». Touché par sa détresse, Éluard la prend sous son aile, préface son recueil de poèmes « Le Poing fermé » (1945). Il l’emmène chez Picasso qui la peint – petit visage déterminé encadré par une chevelure brune et épaisse, lui présente l’écrivain Vercors.
Tuberculeuse, elle rencontre Pierre Daix, un rescapé de Mauthausen, dans un sanatorium. Ils se marient, ont une fille qui est placée chez ses grands-parents par peur de la tuberculose. Ils se séparent en 1947.
Elle part clandestinement en Algérie où elle échappe à un attentat de l’OAS (Organisation de l’Armée secrète). Elle dénonce la torture pratiquée à Paris contre les militants du FLN (Front de libération nationale). Puis elle repart au Vietnam et couvre pendant sept ans la guerre. À son retour, elle travaille comme aide-soignante dans un hôpital parisien et dénonce dans « Les linges de la nuit » (1974), vendu à un million d’exemplaires, la misère de l’Assistance publique. Cinquante ans plus tard, elle réitère les mêmes critiques. Après être restée vingt-quatre heures livrée à elle-même sur un brancard des urgences, elle adresse une lettre ouverte au directeur de l’AP-HP en 2022.
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