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Date : 20-03-2025 19:44:14
FRANCE - 800願 livres de «La Belle et la Bête» revisitée annulés
Une version modernisée, mais jugée trop adulte du conte «La Belle et la Bête» a heurté l’Éducation nationale française, qui a annulé une commande de 800願 livres illustrés destinés à des élèves de primaire, a dénoncé l’auteur mercredi.
Cet auteur, Jul, connu comme scénariste de Lucky Luke ou dessinateur de «Silex and the City», a déploré une «décision politique» de «censure», pour des «prétextes fallacieux» selon lui. Le texte original est conservé, il n'a fait que l'illustrer.
Julien Berjeaux, de son vrai nom, avait été choisi pour l’opération annuelle «Un livre pour les vacances», grâce à laquelle 800願 élèves de CM2 de 10 à 11 ans obtiennent un classique de la littérature française revisité. Il illustrait «La Belle et la Bête», conte traditionnel dans la version de Jeanne-Marie Leprince de Beaumont en 1756.
>>> Un roi ivre chantant du Sardou
Quand le père de la Belle boit «quelques coups de vin», Jul le représente ivre, bouteille à la main, en train de chanter «Les Lacs du Connerama» de Michel Sardou. Téléphones portables et réseaux sociaux sont par ailleurs très présents au fil des 80 pages.
Cette version n’a pas semblé adaptée au ministère, qui l’a expliqué à l’auteur dans une lettre datée de lundi, signée de la directrice générale de l’enseignement scolaire, Caroline Pascal. «L’ouvrage finalisé», selon elle, ne permet «pas une lecture en autonomie, à domicile, en famille et sans l’accompagnement des professeurs pour des élèves âgés de 10 à 11 ans», et «pourrait susciter nombre de questions chez les élèves qui ne trouveraient pas nécessairement de réponse adaptée. En effet, les deux illustrations de l’ouvrage abordent des thématiques qui conviendraient à des élèves plus âgés, en fin de collège ou en début de lycée, telles que l’alcool, les réseaux sociaux, ou encore des réalités sociales complexes», ajoute-t-elle.
Selon Jul, le problème est ailleurs. «Les prétextes fallacieux et pour partie mensongers invoqués pour justifier la censure ne tiennent pas la route une seconde devant l’examen du livre en question, espiègle, tendre et féerique», écrit-il dans un communiqué. «La seule explication semble à chercher dans le dégoût de voir représenté un monde de princes et de princesses qui ressemble un peu plus à celui des écoliers d’aujourd’hui, avance l’auteur. Le grand remplacement des princesses blondes par des jeunes filles méditerranéennes serait-il la limite à ne pas franchir pour l’administration versaillaise du ministère?», s’interroge-t-il.
>>> Elisabeth Borne préface, mais recule…
Le paradoxe est que le livre a visiblement plu au cabinet de la ministre, Elisabeth Borne. Celle-ci écrit en préface: «Vous découvrirez dans cette version, dessinée pour vous, la touche malicieuse et le regard affûté de Jul, qui insufflent à ce conte une modernité nouvelle.»
Mais elle a réagi ce jeudi matin en donnant raison à la directrice de l'enseignement. «Jul a beaucoup de talent, il manie l’ironie, le second degré. Mais sans accompagnement pédagogique, je pense que ça n’est pas adapté. Mais c’est un très beau livre qui pourra être utilisé dans un autre cadre», a commenté Elisabeth Borne sur Cnews/Europe 1.
«L’argent n’a pas été dépensé, les livres n’ont pas été tirés. C’est certainement un ouvrage intéressant, mais pas pour ce cadre pédagogique», a conclu Mme Borne, qui a précisé ne «finalement pas avoir préfacé» cet ouvrage.
Le budget de l’opération «Un livre pour les vacances», lancée en 2018 avec les Fables de La Fontaine et reconduite chaque année depuis, n’est pas connu. Les livres devaient être édités par la filiale édition de la Réunion des musées nationaux-Grand Palais. D’après l’auteur, l’annulation a eu lieu «la veille du lancement de l’impression». Les délais nécessaires risquent de ne pas permettre aux CM2 de 2025 de recevoir un autre livre.
La lettre de Mme Pascal rappelle que le ministère avait émis des «réserves» devant de premières illustrations qui lui avaient été soumises en décembre. Mais dans un commentaire de cette lettre, transmis à l’AFP, Jul indique au contraire que «les éléments qui ont soulevé des critiques ont été pris en compte».
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