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Date : 04-10-2024 19:41:00
BELGIQUE - Une action collective en débaptisation suite aux propos du pape sur l’IVG :
La visite du pape en Belgique, et surtout les propos qu’il a tenus, sur les femmes et sur l’avortement, ont profondément choqué l’ancien ministre socialiste Rudy Demotte. "Intolérable", assène-t-il. Il a demandé à se faire débaptiser et appelle les autres citoyens à faire de même.
Dans un post sur Facebook, celui qui fut aussi bourgmestre de Flobecq et de Tournai évoque les propos "absolument infâmes et profondément réactionnaires" du souverain pontife, et il explique sa démarche : "Rester sans agir reviendrait à cautionner une attitude qui ne correspond plus à mes valeurs. C’est pour cette raison que j’ai décidé de demander officiellement mon débaptême."
Pourquoi en faire une déclaration publique ? Rudy Demotte nous explique qu’en tant que personnalité publique, il ressentait le devoir de parler. "Je pense qu’entendre cette voix-là peut être utile à des gens qui attendent d’être réconfortés par rapport au malaise éprouvé face à ces propos."
Il assure pour autant ne pas partir en croisade contre l’Église, dont il perçoit aussi les courants plus progressistes. Une Église dont il s’était par ailleurs, il le reconnaît, déjà distancié depuis longtemps. "Je suis un agnostique militant. J’ai toujours prôné le libre examen, je suis issu de l’ULB. Je suis aujourd’hui quelqu’un d’engagé dans la cause laïque, mais ça n’empêche que j’étais aussi l’héritier, par ma mère, de cette partie positive des valeurs héritées de l’Église catholique et de ces courants progressistes."
Rudy Demotte ne s’arrête pas là. Dans son texte, il lance un appel à ceux qui, comme lui, "ne peuvent plus tolérer les dérives actuelles de l’Église" : "Je vous invite à vous débaptiser." Et il propose même un modèle de lettre de débaptisation.
Il sait que la débaptisation n’est que symbolique. L’Église ne débaptise pas, elle considère cet acte comme irréversible. Il s’agit simplement d’une sorte de mention de contestation dans le registre des baptêmes. Mais pour l’homme politique aujourd’hui retraité, cet acte symbolique pourrait avoir un impact très concret. "En Belgique, les cultes sont financés par les pouvoirs publics. En vous débaptisant, vous créez un débat sur la légitimité de ce financement. […] Chaque débaptême pourra avoir un impact direct sur une institution qui perpétue des discours inacceptables."
"La démarche de débaptisation ne sert qu’à une seule chose, c’est satisfaire la personne qui l’entreprend. Elle n’a aucun autre impact" réagit Caroline Sagesser, historienne, chargée de recherches au sein du secteur sociopolitique du CRISP (Centre de recherche et d’information socio-politiques), et spécialiste notamment du financement des cultes.
Le financement des cultes n’est pas lié au nombre de croyants qui y adhèrent. "Il dépend surtout du nombre de prêtres. Le financement du SPF Justice va diminuer au fur et à mesure que les prêtres décèdent ou atteignent l’âge de la retraite." L’autre volet du financement, essentiellement via les communes et les provinces, concerne les églises au sens des bâtiments, il dépend donc là du nombre d’églises reconnues.
Le débaptême n’a même aucun impact sur une quelconque statistique, affirme encore Caroline Sagesser, "puisque nous ne disposons pas en Belgique d’un décompte de toutes les personnes qui sont baptisées. La seule chose que l’on a, c’est le nombre de baptêmes administrés sur une année, mais nous ignorons aujourd’hui combien de personnes sont baptisées en Belgique."
Cela n’empêche pas que cette démarche soit régulièrement remise en lumière, comme à la suite de LA DIFFUSION DU DOCUMENTAIRE "GODVERGETEN", SUR LES ABUS SEXUELS AU SEIN DE L’ÉGLISE, QUI AVAIT SECOUE LA FLANDRE. "Je me souviens même que LORS DE LA VISITE EN BELGIQUE DU PAPE JEAN-PAUL II EN 1985, il y a eu une première vague de démarches de ce type-là, raconte l’historienne. Ce sont les propos du pape condamnant l’usage du préservatif au moment de l’épidémie de sida qui a généré cette opposition. Donc, il y avait eu une première vague au milieu des années 80, puis ça s’était un peu calmé. Et ensuite, effectivement, périodiquement, ça revient."
> Chaque année, on dénombre un peu plus de mille débaptêmes. En 2021, le nombre de Belges qui ont demandé à être " débaptisés " a même atteint 5.237.
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