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Date : 14-02-2024 16:21:07
Jean Registre... vos souhaits, très chère.
Donc, j'ai rappelé mon chien, mais j'ai dû m'y reprendre à trois fois en criant de plus en plus fort "Belzébuth, au pied !" - et je vous laisse imaginer que si jamais Belzébuth existe (je veux dire sous une autre forme que mon chien, dans le genre Prince des démons, et, d'après ce qu'on en a dit, second après Satan qu'il détrônera un jour, cette espèce de monstre surnommé le "seigneur des mouches" ou le "seigneur des immondices", qu'on représente d'une taille prodigieuse, assis sur un trône immense, avec un visage bouffi aux yeux ardents, les sourcils élevés, de grosses narines, deux cornes de bouc, plus le front ceint d'un bandeau de feu, la poitrine gonflée bardée de deux ailes de chauve-souris, deux pattes de canard, une queue de lion, et, pour finir, le corps noir recouvert de la tête aux pieds de longs poils hirsutes, bref le genre à faire banquette un soir au bal de la saint Valentin). Bon, où j'en étais, moi ? Ah oui, Belzébuth - mon chien, là, pas l'autre démon (au fait, je ne vous ai pas dit, Belzébuth est un chien adopté, du genre mélange de schnauzer nain croisé de lévrier russe, avec un soupçon d'Irish Wolfhound qui devait passer par là et a dû s'offrir un extra, à ce qu'on m'a dit), cette espèce de tête de lard de Belzébuth donc ne m'écoutait pas, tout occupé qu'il était à embrocher le coq, qui, les plumes ébouriffées comme la coiffe d'une danseuse de french cancan en pleine action, crachotait des cocoricos désespérés (on peut supposer que, comme l'a chanté Brassens dans "Gare au gorille", l'animal criait "maman"
- pour les linguistes intéressés, en langage de coq, "maman", ça se dit toujours "cocorico !" . Vous voyez d'ici le tableau ? Mon chien, tout occupé à se dévergonder avec ce qu'il prenait sûrement pour une poule (il faudra que je songe à lui faire examiner la vue), sourd à mes appels, m'obligea donc à aller le récupérer manu militari. Mais j'ai oublié de vous reparler du fermier, finalement arrivé sur les lieux, bien décidé à sauver son volatile de la ferveur de mon bâtard de chien en rut, brandissant une fourche et s'apprêtant à embrocher mon bestiau (décidément, dans cette histoire, tout le monde voulait embrocher tout le monde, ou presque - pas moi, merci), avant que je retienne son bras, arrêtant son coup funeste, tout en m'excusant et en annonçant que j'allais payer les dégâts. A ce moment-là, le fermier, rouge de colère (comme la crête de son coq, d'ailleurs), se calma et me questionna: "et à combien vous me l'achetez maintenant, mon coq, dites voir ! ?". Et moi, voyant l'état de la pauvre bête, que Belzébuth, peut-être pris de remords (tout est possible), léchouillait tranquillement, je proposais timidement: "je ne sais pas, moi, 20 euros, non, ça irait ?". Et c'est ainsi que je revins chez moi, suivi par Belzébuth qui traînaillait la queue basse (ce qui se comprend, vu l'exercice d'équilibriste libidineux auquel il venait de s'exercer), et avec dans les bras un ersatz de coq qui m'avait finalement coûté 50 euros (mais c'était ça ou un coup de fourche). Un coq pour lequel j'étais déjà en train d'imaginer une recette de coq au vin, du genre: la veille, découper et mettre le coq à mariner, en le plaçant dans un grand saladier avec un oignon et des carottes, puis verser le vin (un gros rouge corsé), puis déposer un bouquet garni et ajouter des grains de poivre. Après, couvrir et laisser mariner une nuit au réfrigérateur. Le lendemain, égoutter les morceaux de coq et les légumes, puis les éponger avec du papier absorbant. Enfin, filtrer la marinade et réserver. A la suite, faire chauffer de l'huile dans une cocotte, y jeter les morceaux de coq et les laisser bien dorer sur toutes les faces. Retirer les morceaux de la cocotte une fois dorés, mettre les légumes à la place, et les laisser revenir à feu doux 5 minutes, puis saupoudrer le tout de farine, et bien remuer pour bien enrober les légumes. Ensuite remettre les morceaux de coq dans la cocotte, ajouter des gousses d'ail écrasées, faire chauffer 5 centilitres de cognac, le verser et flamber. Il ne reste plus qu'à mouiller le tout avec le vin de la marinade, à ajouter un fond de veau, à saler et poivrer. Puis porter le tout à ébullition, couvrir, baisser le feu et laisser mijoter 2 h 30 à feu doux. Pour finir, émincer 250 grammes de champignons de Paris, les faire dorer dans une poêle avec 250 grammes de lardons pendant environ 5 à 10 minutes. Les rajouter dans la cocotte 15 minutes avant de servir. Il ne reste plus qu'à goûter et rectifier au besoin l'assaisonnement. Bon, ça c'est fait. Je comptais partager ce repas avec mes voisins, un couple de Belges retraités de la Compagnie du Gaz du Hainaut, dont la maison jouxtait la ferme dont je vous ai parlé, là où j'avais récupéré pour une fortune le pauvre coq. Sauf que, en me rangeant pour laisser passer une 2 chevaux qui arrivait face à nous sur le chemin étroit que j'avais emprunté pour rentrer chez moi, je me suis retourné pour vérifier que Belzébuth était bien sur le bas-côté, et tout à coup le coq s'agita et m'échappa des mains, pour finir sous les roues de la 2 chevaux, sous lesquelles il finit aplati comme une sole anorexique. Adieu mon repas ! Ce jour-là, Belzébuth finit consigné pour la journée à la niche (non mais !) et moi au Mc Donald's du coin, avec un Chicken McNuggets TM (du poulet, quoi - enfin, je suppose)...
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Tête bleue
Bronze
Argent
Or
Platine
Titane