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Date : 24-09-2024 07:49:22
LA RUPTURE
Quatre heures du matin, samedi
Ne dis rien, elle sait...
Un air de musique me mange la tête
Il y a une radio à cette heure-là? Je l'entends
Comme j'entends ce silence, épais
La ville dort encore, repue
Pourquoi cette musique, pourquoi?
C'est une chanson que tu aimais, souviens-toi
Une chanson comme un ciel blanc, un cri
Amour et oranges
Quatre heures du matin
Ne dis rien, elle sait.
Je suis resté longtemps, accroché au téléphone
Comme au fil de nos vies
A écouter son souffle, encore une fois, une dernière
Si près de mon oreille
Ses pauvres mots misérables, et les miens, donc!
Déjà perdus, déjà dans d'autres vies
Comme pour les chats
Car je veux croire qu'il y a d'autres vies
Ne dis rien, elle sait...
J'avais tout, je n'ai jamais autant vécu
Qu'à vivre avec elle
Nous avons passé des moments difficiles
Ces moments où tout pousse à croire qu'il n'y a plus rien
Animaux tristes
La chaleur d'autres corps
Pour être sûr d'exister
Perdus quand tout s'ouvrait à nous
Mais comme nous avions peur de l'air qui entrait par la fenêtre!
Frileux, peureux, parce qu'habitués à subsister, seulement
Ne dis rien, elle sait
Sais-tu ce qu'étaient ces voyages rêvés, au loin
Au bout du monde, le nôtre,
Au bout de nous-mêmes, qui nous emportaient
J'y ai cru, tu sais, ne dis rien
Il n'aura fallu que tes yeux, une parole, un geste
Un sourire, quelques larmes
Je ne sais plus, ne dis rien, elle sait
Quatre heures du matin
La ville va s'éveiller, les voitures rouler
Ne dis rien, quatre heures, elle sait
Nous ne ferons plus l'amour ensemble
Je n'ai pas vu que nous n'étions plus dans le même train
Et depuis quand?
Ne dis rien, elle sait
Nous n'aurons plus ensemble que quelques pauvres souvenirs
Petits, petits
Drinkin' again
Souvenirs de corps dévêtus, qui s'entrechoquent
De mains qui caressent
Au lieu de griffer, comme on leur avait appris
Ne dis rien...
Ces plateaux sans fin, roux, pierreux, aux grandes croix rouillées
Le ventre de la France
La petite bergerie des Causses qui nous vit nous aimer
Nus, pour la première fois
Ne dis rien... ne dis rien
Il a fallu un rien, et tout a basculé
Mes mains cherchent ton corps, dans la nuit
Otis Redding chante, ne dis rien, la ville s'éveille
Elle se lève, là-bas, elle va vers où
Je ne sais pas, je ne sais plus
Ne dis rien
Tu n'étais qu'un rêve, un rêve qui pourtant, cette fois
Pourrait me briser
Et je vivrai pourtant, jusqu'au bout
Ne dis rien, je rêve
Encore un instant
Avant de m'éveiller...
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