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Date : 30-11-2023 20:40:02
CLIMAT - La Belgique une nouvelle fois condamnée pour son inaction climatique :
Le jour même de l’ouverture de la COP28, le sommet mondial pour le climat, la Belgique et son Premier ministre auraient sans doute aimé se présenter avec un meilleur bulletin. Seulement voilà, les circonstances sont cruelles. Alors qu’Alexander De Croo (Open VLD) s’envole pour Dubaï, l’Etat fédéral et les Régions bruxelloise et flamande ont été condamnés ce jeudi matin par la cour d’appel de Bruxelles dans le cadre de l’affaire climat. Les instances gouvernementales étaient attaquées par un collectif d’organisations et de citoyens qui leur reprochaient leur « inaction climatique ». En première instance, les quatre entités avaient été reconnues coupables de faute. Mais les juges n’avaient pas estimé nécessaire d’imposer à la Belgique des objectifs climatiques plus contraignants, ni d’astreintes.
La cour d’appel, quant à elle, ne suit que partiellement les militants pour le climat : l’objectif actuel est conformé et d’éventuelles astreintes viendront plus tard. Les juges établissent par ailleurs une différence entre la Wallonie, jugée meilleure élève, et les autres entités. La Wallonie échappe à l’opprobre, compte tenu de ses résultats dans la diminution des émissions, et des mesures contenues dans son plan climat. La Wallonie a atteint son objectif en 2020, relève la Cour. Et en 2020, la réduction de ses émissions s’élevait à 38,5%.
Dans un jugement de 160 pages, le tribunal confirme donc que les autorités (Bruxelles, la Flandre et le fédéral) ont violé les articles 2 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (le droit de toute personne à la vie et le droit au respect de sa vie privée et familiale et de son domicile) et ont « commis des fautes » au regard du Code civil. La cour « donne injonction » au fédéral et aux trois Régions « de prendre les mesures appropriées pour faire leur part dans la diminution du volume global des émissions annuelles de gaz à effet de serre à partir du territoire belge d’au moins 55 % en 2030 par rapport à 1990 ». Selon les derniers chiffres, rappellent les plaignants de l’Affaire climat, «la Belgique a atteint une réduction de 24 % en 2021, qui doit maintenant être obligatoirement doublée d’ici 2030».
Contrairement à ce que demandaient les plaignants, le tribunal ne réclame donc pas que la Belgique aille au-delà de son objectif actuel fixé dans le cadre européen. Dans leur argumentation, les avocats de l’Affaire climat demandaient à la cour d’ordonner la réduction des émissions de gaz à effet de serre de 61 % à l’horizon 2030 (par rapport à 1990).
Il appartient aux quatre gouvernements, dit le jugement, de définir entre eux « quelle est la part qui doit être supportée par chacune d’entre elles ». C’est précisément ce que les entités belges ne parviennent pas à faire dans leurs interminables négociations concernant le partage de l’effort climatique pour 2030.
Le tribunal écarte cependant l’idée d’imposer dans l’immédiat des astreintes aux Régions et au fédéral et renvoie cette question à la production des chiffres officiels concernant les émissions belges de gaz à effet de serre pour les années 2020 à 2024 ainsi que le plan national énergie-climat toujours dans les limbes des négociations intrabelges.
En première instance, le tribunal n’avait pas imposé d’astreinte aux gouvernements belges, estimant qu’en prononçant une telle injonction, ils risquaient de porter atteinte au principe de la séparation des pouvoirs entre le politique et le judiciaire.
Première à réagir, la ministre fédérale du Climat, Zakia Khattabi (Ecolo), a estimé que «le signal est sans appel en ces premiers jours de la COP28». L’accord de la Vivaldi inclut l’objectif de -55%, dit la ministre. «J’analyserai le verdict pour renforcer les mesures du fédéral. Tant cette condamnation que les critiques qui arriveront [de la Commission européenne, NDLR] sur le plan national énergie-climat seront autant de leviers pour renforcer la politique climatique fédérale».
De son côté, le ministre wallon du Climat, Philippe Henry (Ecolo), ne cachait pas sa satisfaction: «Je salue la reconnaissance sans ambiguïté de l’engagement de la Wallonie dans sa part de l’effort à effectuer pour réduire les émissions globales de gaz à effet de serre. Cet arrêt confirme également l’importance de l’implication citoyenne dans le débat public sur ce sujet crucial, une dynamique que la Wallonie a soutenu dans l’élaboration de son plan climat.»
Quant au ministre bruxellois du Climat, il a souligné que «Bruxelles est sur une trajectoire positive par rapport aux objectifs, ayant déjà concrétisé jusque 2022 une réduction de ses émissions de gaz à effets de serre de -30 % depuis 2005. La Flandre atteint -17 % et la Wallonie -19%».
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